jeudi 9 octobre 2008

Shaastra - la face cachée de l'Iceberg...


L'évènement s'approchant à grand pas, je commençais à guetter les grandes affiches en 4 par 3 mètres qui allaient fleurir dans tout le campus, les réunions détaillées de présentation des différents évènements , les passages dans les amphis pour mettre un peu d'ambiance et donner aux gens l'envie de participer; créer l'attente, c'est finalement créer l'évènement !!

Sachant le formidable travail qu'était déjà capable de faire une modeste équipe Bde de 15 personnes (aller, à tout casser de 7-8 personnes vraiment motivées), pour 1000 élèves avec un budget minimaliste, j'avais du mal à imaginer ce que serait la grande campagne de communication qu'allaient mettre en place cette cinquantaine d'étudiants, s'appuyant sur un budget phénoménal !!!

Campagne de communication, il n'y eut pas...

Tout juste quelques affiches en noir et blanc, format A3 maximum, certaines en couleur, apparurent sur quelques panneaux d'affichage des hostels et des départements, toujours incomplètes. Le nom de l'évènement apparaissait en gros, malheureusement rarement explicite, et aucune information supplémentaire n'étaient fournies (date, lieu, horaire, infoline, etc.), mais par contre on savait que cela allait être génial et que l'on allait bien s'amuser - dixit l'affiche - et on avait le droit à une belle image pour patienter... Deux jours avant l'ouverture de Shaastra, nous eûmes droit à un écran devant le grand mess Himalaya sur lequel était projeté un film présentant un par un tous les évènements. Malheureusement le son était assuré par les enceintes de l'ordinateur portable, peu audible au milieu du brouhaha ambiant et il aurait fallut rester 1h30 debout à côté du grand escalier très passant menant à l'étage pour voir l'ensemble de la présentation...

Cette superbe fête de la technique commençait d'une bien piètre manière...

La suite ne devait pas remonter le niveau. Tout l'évènement se résume à un seul mot : l'amateurisme.

La communication fut défaillante à tous les points de vue : il n'y eut tout simplement pas de communication, que ce soit en amont de l'évènement - voir précédement - ou pendant l'évènement. Pour être au courant du programme mouvant des activités, il fallait tout d'abord savoir où trouver la liste détaillée des horaires, c'est à dire trouver quelqu'un étant en mesure de nous indiquer où trouver le centre d'information (pas facile, le campus est vaste et tout le monde étant dans notre situation...) et ensuite rester à proximité du stand central qui annonçait au fur et à mesure les annulations, les changements perpétuels de salle et d'horaire . Un sacré bordel...

Les activités/évènements en eux-même n'était pas mieux lotis, ils affichaient au mieux une demi-heure de retard et les organisateurs semblaient à chaque fois complètement paniqués par la situation.
Dialogue typique :
V-"On laisse entrer les gens ?"
O-"Aucune idée"
V-"Tu as le numéro de Rafid, il devrait savoir ?"
O-"Non, j'ai oublié mon portable",
V-"Et celui du coordinateur ?"
O-"Il fallait ?"
V-"Qu'es ce qu'on fait alors ?",
O-"Je sais pas, tu as une pièce ?"
...
(seule la dernière réplique n'est peut-être pas véridique, mais fortement probable...)

La dernière des 3 "Shaastra Nights" représente surement la caricature de tout ce qu'il ne faut surtout PAS faire. Elle avait lieu à 20h dans le SAC (Student Activities Center), un grand amphithéâtre style colisé romain - pas de sièges mais des marches de béton guise de banc - avec une large scène équipée d'enceintes en fin de vie et d'un jeu d'éclairage correct. Cette dernière "Shaastra Night" était dédiée aux robots à la pointe de la technologie et devait s'articuler principalement autour d'impressionnantes démonstrations. Malheureusement, une nouvelle fois, le résultat fut plus que décevant. La soirée commença avec 45 minutes de retard et plutôt que de faire patienter les gens dehors pendant que toute l'équipe s'activait en coulisse pour finir l'installation au plus vite, ils avaient décidé de laisser les portes grandes ouvertes. Et si ils tenaient absolument à nous faire rentrer, il aurait fallut passer un film, de la musique, mettre un peu d'ambiance, n'importe quoi... Au lieu de ça, ils laissaient entrer les gens au compte goutte, offrant à tous le spectacle de leur incompétence : multiples essais infructueux pour faire fonctionner l'un des trois vidéo-projecteurs principaux, personnes de l'organisation courant partout, l'un apportait une chaise, un autre la rapportait, pendant qu'un troisième - sur la scène - s'amusait à lancer sur l'écran central des passages des vidéos qu'ils avaient prévu de passer au cours de la soirée, entrecoupées d'extraits des films qu'il avait sur son disque dur (1min à chaque fois tout au plus), ouvrait un Word, le refermait, je m'attendais presque à ce qu'il regarde ses mails sur grand écran tellement il semblait s'ennuyer...

La salle du SAC

Au final, après 45 minutes d'attente, la soirée a pu commencer avec l'un des 3 écrans qui ne marchait pas (celui de gauche a rendu l'âme peu de temps après la prise de la photo), et le deuxième écran mural à droite qui était une retransmission de l'écran principal, mais à la l'indienne. Leur technique était très originale puisque plutôt que de tirer un câble, l'un des caméraman sur la scène filmait l'écran principal (de travers en plus) et envoyait ensuite l'image sur le deuxième écran (à droite). Inutile de dire que l'effet obtenu n'était pas superbe. Peut-être était-ce l'un des tours en compétition pour l'activité où il fallait présenter la manière la plus compliquée possible de faire quelque chose de tout simple... Vous vous souvenez ?

Comme on le devine sur la photo, tout leur staff est installé sur la scène, seule l'une des tables sert aux démonstrations, celle complètement à droite de la scène. Le monde à l'envers : c'est pas eux que l'on est venu voir, mais les robots !!! Peut-être un détail, mais il aurait été surement plus judicieux de faire de la rétro-projection (projection par l'arrière de l'écran), ils avaient largement la place, parce que le principe du vidéo projecteur posé sur une chaise, cela fait un peu cheap...

Heureusement, il y eu tout de même quelques bonnes choses au milieu de toutes ces blagues, il fallait juste faire un peu de tri. Renault s'était investi dans le projet et avait réussi à faire venir une F1 qui était en exposition devant leur stand.


La renault F1, Lucien a adoré

De même, le stade qui regroupait le centre d'information, un hall "climatisé" qui ne servait à rien (les 5 clims ne pouvait rien contre l'isolation calamiteuse de la structure faîte de bambou/métal et de tissu épais), et de nombreux stand entreprises, dont celui de Renault, et une vaste partie réservé à l'armée de terre indienne qui avait amené un char d'assaut qui fit plusieurs démonstrations amusantes pendant les 5 jours.


Le stade aménagé



Le char d'assaut en démonstration

Un autre point très positif de Shaastra était une connexion internet H24 dans nos chambres, ce qui était inespéré !! Depuis le début de l'année, la connexion est interrompue entre minuit et 14h pour "que les élèves ayent en cours", no comment. Ce fut donc quelques jours de répit bien mérité après deux mois de restriction et de frustration. J'ai d'ailleurs obtenu des vitesses de connexion jamais atteintes en deux mois, jusqu'à 136 kbits/s, l'ADSL indien en quelques sortes *... En temps normal, celle-ci tourne plutôt autour de 35 kbits/s !

Cette bonne nouvelle fut complétée par l'installation d'une série de mini-restaurants sur le campus pour pouvoir nourrir les milliers de visiteurs présents : dominos pizza, fast food type McDo, glaces, jus, le grand luxe après 2 mois au régime riz et sauce pimentée !!

Tous les stands de restauration

Mes amis les singes qui ont bien compris tout l'intérêt gastronomique de ces nouvelles constructions humaines !!

Juste à côté, quelques images amusantes
Sur la photo : Lucien

Le seul évènement qui valait vraiment le coup fut la seconde "Shaastra Night". Un immense laser show de 45 minutes qui nous a mis plein les pupilles !! J'ai enfin vu quelque chose d'époustouflant, qui n'avait rien à envier aux spectacles du même genre que l'on trouve en Europe. Du gros son, des lasers puissants (je fermais d'ailleurs les yeux à chaque fois qu'il me passait sur le visage, je ne suis pas rassuré depuis l'histoire des 200 brulés du show de Moscou...), une musique rythmée, une foule en délire et même quelques frissons !! Bref, un grand moment de plaisir si l'on fait abstraction des traditionelles 30 minutes de retard !!

Un superbe effet laser

Eclairage parcellaire du public

On a même eu le droit à un laser bleu et à quelques effets pyrotechniques !

Le feu d'artifice qui a clôturé le spectacle

C'est déjà fini ?!!

Au final, une semaine qui aura été marquée par la désorganisation et l'amateurisme que n'ont pas pu sauver quelques très bonnes choses tel que le laser show, les démonstrations militaires, l'accès internet et la nourriture "normale"... C'est d'autant plus impardonnable qu'avant l'évènement, les organisateurs étaient très arrogants, assurant à qui voulait l'entendre que leur évènement était le meilleur au monde, le plus gros, le mieux organisé, qu'eux-même étaient les meilleurs ("C'est d'ailleurs pour cette raison que nous sommes à l'IIT"), allant jusqu'à se comparer au MIT. J'étais prêt à tout leur pardonner, ce ne sont que des étudiants comme moi, mais pas avec cet état d'esprit. D'après les échos que j'ai pu entendre, cette nième édition de Shaastra est considérée comme un nouveau succès par ses organisateurs. Un bien triste constat, mélange d'arrogance et d'aveuglement qui pousse à s'interroger. Ce thème de l'image que les élèves IIT ont d'eux même, particulièrement cette année, et ses conséquences, fera très bientôt l'objet d'un nouveau post .

La classe, non ?

*NB : Les premiers modems internet, il ya une dizaine d'années, offrait des connection de l'ordre de 56kbits/s. Les connections ADSL actuelles proposent des débits variant entre 2 et 8 Mo/s...

PS: Aux esprits critiques : je sais bien qu'habituellement on ne dit pas "la face cachée de l'Iceberg", mais plutôt "la partie immergée de l'iceberg" ou encore l"a face caché de sa personnalité", c'est juste que "la partie immergée", c'était pas beau, et que d'abord, c'est moi qui écrit, et que donc je fais ce que je veux !! En plus, c'est pas dénué de sens...

PPS : Sophie, j'ai pris cette photo la semaine dernière, je te promets sur tous les grains de riz de ce midi (ça fait beaucoup) que j'ai coupé depuis cette barbe que tu ne saurais voir comme dirais l'autre ... ;)